L'inscription de dépenses obligatoires et le mandatement d'office

Mis à jour le 09/10/2022
  • La procédure d’inscription de dépenses obligatoires

Les dépenses obligatoires peuvent faire l’objet d’un mandatement d’office, la procédure étant prévue à l’article L.1612-16 CGCT.

1/ Le fondement juridique

L'inscription d'office d'une dépense obligatoire complète la procédure de rétablissement de l'équilibre réel du budget prévue par l'article L.1612-5 du CGCT (saisine de la Chambre Territoriale des Comptes ou CTC puis, le cas échéant, règlement du budget par le haut-commissaire).

Ainsi, tant que le délai d'un mois après la transmission du budget imparti au représentant de l'Etat par l'article L.1612-5 du CGCT n'est pas expiré, celui-ci doit mettre en œuvre la procédure de ce même article L.1612-5 puisque le budget en cause ainsi adopté n'est pas en équilibre réel, dans la mesure où il ne retrace pas l'intégralité des dépenses à acquitter.

A l'expiration de ce délai, en revanche, il y a lieu de recourir à la procédure de l'article L.1612-15 du CGCT (mise en demeure de la CTC, puis demande de celle-ci au haut-commissaire de procéder à l’inscription d’office).

 2/ La saisine de la CTC

 Le haut-commissaire, le comptable public attributaire, et toute personne y ayant intérêt peuvent saisir la CTC

Cette saisine doit être motivée et s’appuyer sur toutes justifications utiles (article R.1612-32 du CGCT). Concernant le délai de saisine de la CTC, aucune condition n’est prévue, à l’exception de la règle de la déchéance quadriennale des créances publiques fixée par la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968.

-  soit la CTC, qui doit se prononcer dans un délai d'un mois, ne reconnaît pas le caractère obligatoire de la dépense en cause ou que les crédits sont suffisants pour sa couverture.

Elle notifie sa décision motivée à l’auteur de la demande à la collectivité concernée et au représentant de l’Etat, s’il n’est pas l’auteur de la demande. La procédure s’arrête.

Le refus de la CTC de constater le caractère obligatoire d'une dépense met un terme à la procédure car le haut-commissaire est lié par l'avis de la CTC, ce qui constitue une garantie pour la collectivité. En conséquence, cet avis est une décision administrative faisant grief susceptible de recours contentieux (CE, 23 mars 1984, Organisme de gestion des écoles catholiques de Couëron, Lebon, p. 126).

-  soit la CTC reconnaît le caractère obligatoire de la dépense et constate qu’elle n’est pas inscrite mais pour un montant insuffisant.

Elle adresse alors à la collectivité une mise en demeure d'inscrire la dépense au budget. Si dans un délai d'un mois, la mise en demeure n'est pas suivie d'effet, la CTC demande au Haut-commissaire d'inscrire cette dépense au budget de la commune et propose si besoin est, la création de ressources ou la diminution des dépenses facultatives destinées à couvrir la dépense obligatoire.

Le Conseil d’Etat a jugé que l’avis de mise en demeure d’une CTC était insusceptible de recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif en tant que premier acte de procédure pouvant aboutir éventuellement à l’inscription d’office par le haut-commissaire. (CE, 30 janvier 1987, département de la Moselle).

3/Le règlement du budget par le haut-commissaire

Le représentant de l’Etat règle et rend exécutoire le budget rectifié, conformément à l’avis rendu par la chambre.

Il peut s'écarter des propositions de la CTC par décision motivée (CE, 10 février 1988, commune de Brives-Charensac contre Arnaud, Lebon p. 53). Dans ce cas, le haut-commissaire n'est pas lié par les propositions de la CTC, mais sa compétence n'est pas totalement discrétionnaire.

Son refus d'appliquer les propositions de la CTC doit être motivé et peut faire l'objet d'un contrôle du juge de l'excès de pouvoir qui sera conduit à préciser les cas où le haut-commissaire peut refuser d'inscrire d'office une dépense obligatoire alors même que la CTC lui propose de le faire. En cas d’illégalité constatée, la responsabilité de l’Etat ne peut être engagée qu’en cas de faute lourde (CE, 29 avril 1987, école Notre-Dame-de-Kemitron).

Conformément à l’article R.1612-11 du CGCT, la décision par laquelle le haut-commissaire règle le budget et le rend exécutoire est adressée dans le délai de 20 jours à compter de la notification de l’avis de la chambre territoriale des comptes d’une part à la collectivité, d’autre part à la chambre.

A noter toutefois que le délai de 20 jours ne constitue pas une garantie pour les collectivités ou contribuables et n’est pas "imparti à peine de nullité de la procédure". Son non-respect n’est pas dans ces conditions susceptible d’entacher d’illégalité un arrêt préfectoral intervenant plus de 20 jours à compter de la notification de l’avis de la chambre territoriale des comptes (Cour administrative d’appel de Paris n° 94PA00296, 13 décembre 1994, Aff. Antoine).

  • La procédure de mandatement d’office

Les crédits nécessaires au paiement des dépenses obligatoires doivent être inscrits au budget de la collectivité territoriale concernée et ensuite faire l’objet d’un mandatement.

Lorsqu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget de la collectivité ou l’a été dans un montant insuffisant, le haut-commissaire ne peut procéder à son inscription d’office qu’après avis de la CTC, conformément à l'article L.1612-15 du CGCT.

Il agira alors en lieu et place de l'ordonnateur en suivant la procédure de contrôle budgétaire.

L'article L.1612-16 du CGCT prévoit qu’à défaut de mandatement par l'ordonnateur des dépenses qui auront fait l'objet d'une procédure d'inscription d'office, mais également des dépenses dotées de crédits au budget, le haut-commissaire peut y procéder d'office.

Le haut-commissaire, s’il constate que les crédits nécessaires au paiement d’une dépense obligatoire inscrite au budget sont disponibles, peut engager la procédure du mandatement d’office directement. Il constate lui-même le caractère obligatoire de la dépense. Le haut-commissaire est tenu de procéder au mandatement d’office si l’ordonnateur refuse de mandater une dépense inscrite d’office dans son budget à la diligence du haut-commissaire.

Toute personne y ayant intérêt peut saisir le haut-commissaire (un créancier par exemple). Le haut-commissaire est tenu de procéder au mandatement d’office si l’ordonnateur refuse de mandater une dépense inscrite d’office dans son budget à la diligence du haut-commissaire.

Cette procédure se déroule en deux étapes :

 1. Le haut-commissaire met en demeure le maire de mandater les crédits en cause

L'absence de cette mise en demeure préalable entache d'illégalité l'arrêté préfectoral mandatant la dépense obligatoire (CE, 21 décembre 1994, Département de la Marne, Lebon p.567).

En outre, cette mise en demeure n'est pas, en elle-même, une décision susceptible d'être déférée au juge administratif puisqu'elle ne constitue que le premier acte de la procédure qui pourra éventuellement aboutir au mandatement d'office de la dépense par le haut-commissaire (TA Rennes, Ord. du 8 juillet 1996, Commune de Bono).

 2. Le haut-commissaire mandate d’office les crédits

Si dans un délai d'un mois suivant la mise en demeure, le maire refuse toujours de mandater les crédits en cause, il revient au haut-commissaire d'y procéder d'office par arrêté. Si la dépense est égale ou supérieure à 5 % de la section de fonctionnement du budget primitif, le délai dont dispose le maire après la mise en demeure est de deux mois.

Dès lors que le débiteur n'a pas procédé au mandatement d'une dépense obligatoire, la non-application de la procédure de mandatement d'office par le représentant de l'Etat est constitutive d'une faute lourde, susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat (TA de Basse-Terre, n° 931315 n° 931315, 15 janvier 1996, Sociétés SNBBS-ARTEX c/ Région Guadeloupe; CE du 26 juin 1987, n° 87.725, ministère de l’intérieur c/ organisme de gestion de l’école « La providence »).

  •  La procédure d’inscription et mandatement d’office des intérêts moratoires

Le comptable assignataire de la dépense doit informer l’ordonnateur et le représentant de l’Etat.

L’article L.1612-18 du CGCT fait obligation au comptable assignataire de la dépense d’informer, dans un délai de 10 jours suivant la réception de l’ordre de paiement, l’ordonnateur et le représentant de l’Etat de l’existence d’intérêts moratoires dus et non mandatés.

D’autre part, des délais précis sont impartis au haut-commissaire pour mettre en œuvre, dès qu’il a connaissance de cette information, la procédure de mandatement d’office des sommes dues à ce titre et le cas échéant la procédure d’inscription d’office, si les crédits nécessaires ne figurent pas au budget de la collectivité :

  • lorsqu’il a connaissance de l’existence d’intérêts moratoires non mandatés, le haut-commissaire adresse dans un délai de quinze jours à l’ordonnateur la mise en demeure de mandatement.
  •  à défaut, d’exécution dans un délai d’un mois, le représentant de l’Etat procède au mandatement d’office de la dépense.

Si les crédits nécessaires ne figurent pas au budget de la collectivité locale concernée, le haut-commissaire saisit la chambre territoriale des comptes au titre de la procédure d’inscription d’office des dépenses obligatoires prévues à l’article L.1612-15 du CGCT, dans un délai de 15 jours à partir de la date où il a connaissance de cette insuffisance de crédits. Il procède ensuite au mandatement d’office des sommes correspondantes dans les 15 jours suivant la réception de la délibération inscrivant les crédits ou de sa décision réglant le budget rectifié.

Toutefois, cette procédure n’est mise en œuvre que lorsque le montant du mandat correspondant au règlement du principal est supérieur à un seuil de 4.573 euros (soit 545.704 FCP), conformément au décret n° 86-429 du 14 mars 1986.