11-03-2021 - Déclaration de M. le Haut-commissaire de la République Dominique SORAIN

Mis à jour le 17/03/2021

Monsieur le Président

Mesdames et Messieurs,

Il y a un an, jour pour jour, on avait détecté le premier cas de covid-19 et je prenais, en accord avec le Pays, la première mesure consécutive à la crise sanitaire, l’arrêt des escales des paquebots de croisières en Polynésie française.

Nous voici à nouveau aujourd’hui avec le président Edouard FRITCH pour faire un point de situation sur notre stratégie commune de lutte contre le Covid-19, un an après le déclenchement d’une crise globale dont vous saisissez tous la gravité et les conséquences sanitaires, économiques et sociales : plus de 2,6 millions de personnes décédées et près de 120 millions de personnes malades sur notre planète.

Plus proche de nous un lourd tribut a été payé. Ce fléau a en effet emporté 141 Polynésiens et nos pensées accompagnent les familles touchées par la perte d’un être cher.

La situation mondiale et nationale est donc à nouveau très préoccupante :  le 10 mars la métropole comptait encore 30.000 nouveaux cas et 4000 de nos concitoyens étaient en réanimation.

La dégradation s’étend à toutes les régions du monde, même celles qui avaient été épargnées jusque-là. C’est ainsi que 129 cas ont été détectés à Wallis-et-Futuna et 16 en Nouvelle-Calédonie, ce qui a conduit les autorités locales à prononcer un confinement de deux semaines.

Face au rebond de cette crise, l’Etat et le Pays ont érigé il y a plusieurs semaines 2 lignes de défense qui nous ont déjà permis de contrer cette évolution.

La première ligne de défense consiste à réduire les arrivées de passagers sur le territoire pour contrer la diffusion du Covid et de ses variants.

C’est le sens de la limitation du nombre de « motifs impérieux » permettant d’accéder à la Polynésie ou de la quitter.

Dans ce cadre, depuis le 3 février, seules les personnes justifiant d’une raison impérieuse d’ordre familial, sanitaire ou professionnel peuvent voyager au départ ou à destination du fenua.

J’ai donné des instructions très claires de rigueur dans les contrôles et le dispositif vient d’être à nouveau resserré : depuis le 3 mars 2021, le Haut-Commissariat vérifie en amont de l’embarquement le caractère véritablement impérieux des motifs, qui doivent être déclarés dans les 6 jours précédant le départ.

Cette approche permet d’harmoniser les contrôles qui étaient auparavant confiés aux compagnies aériennes au moment de l’enregistrement.

Si la plupart des personnes renoncent spontanément à leur voyage lorsqu’elles ne remplissent pas les conditions, nous avons également refusé plus d’une centaine de demandes à ce jour.

La deuxième ligne de défense sanitaire est la quarantaine de 10 jours en remplacement de la quatorzaine

Depuis le mardi 9 février, elle a été ramenée à 10 jours par le Pays et se déroule toujours soit en site dédié, soit à domicile et un test au 8e jour est réalisé avant de sortir d’isolement.

A cet égard, les services de l’État et du Pays travaillent ensemble pour s’assurer qu’à l’arrivée à l’aéroport de Faa’a les personnes soient guidées, informées et respectueuses des décisions qui leur sont notifiées.

Les contrôles sont effectués par la gendarmerie, la police nationale et les polices municipales.

Au total, ces dispositifs ont fait chuter de manière importante le nombre de passagers : les arrivées ont été divisées par 4 en un mois (de 800 personnes début février à 200 arrivées la première semaine de mars).

Il n’en reste pas moins que certains déplacements doivent se poursuivre.

Je pense évidemment aux évacuations sanitaires qui doivent pouvoir se dérouler dans de bonnes conditions ou aux travailleurs dont la compétence unique en fait un atout irremplaçable pour le territoire mais je pense également au retour des résidents polynésiens dans leurs foyers.

Nous sommes avec le Président de la Polynésie parfaitement conscients de l’importance et de la durée des sacrifices demandés, qu’il s’agisse du domaine de l’économie locale ou des libertés quotidiennes.

Mais ces efforts étaient et demeurent nécessaires pour préserver la population de nos 5 archipels.

En effet, la situation mondiale, ne permet pas d’envisager une évolution à court terme de ce dispositif. Le danger est encore trop présent, les variants étant une menace avérée.

Je veux maintenant m’arrêter sur le bilan interne à la Polynésie qui peut se résumer ainsi : nous avons su, ensemble, faire les efforts nécessaires pour nous protéger et les résultats sont aujourd’hui toujours positifs.

Dès septembre et octobre 2020 l’Etat et le Pays ont en effet décidé, d’un commun accord, de restreindre certaines activités pour enrayer la progression de l’épidémie et ainsi protéger les capacités hospitalières.

Aujourd’hui, les contraintes acceptées par la population permettent de dire que la Polynésie présente en ce moment une situation bien meilleure que dans la plupart des points du globe.

Un premier chiffre l’illustre : le taux d’incidence dépassait à l’automne les 

1 000/100.000 habitants, avant de tomber aujourd’hui à 22/100.000, c’est-à-dire bien en deçà du seuil d’alerte qui se situe à 50.

Par ailleurs, le nombre de nouvelles contaminations quotidiennes est depuis plusieurs jours inférieur à 15 et le nombre de cas actifs est proche de 50 contre plus de 2000 fin octobre 2020.

A l’hôpital, le nombre de personnes en réanimation est de 3 et celui des personnes hospitalisées pour cause de COVID de 7 sont à leur niveau le plus bas.

Enfin, avec une quinzaine de cas de variants détectés, la situation est, à ce stade et de manière prudente, sous contrôle en Polynésie française.

Ces données valident a posteriori les choix arrêtés en Polynésie par l’État et le Pays, qui ont toujours tenu à concilier rigueur dans la protection sanitaire et maintien de la vie économique et sociale en faisant appel à la responsabilité de chacun.

Je tiens une nouvelle fois à remercier tous les Polynésiens et Polynésiens pour votre comportement responsable. Cela a contribué à sauver la vie des plus vulnérables et permis de préserver notre système hospitalier de l’implosion.

De même, je veux dire ma reconnaissance aux tavana qui ont su sensibiliser les populations sur les mesures sanitaires à respecter. 

Si ce bilan est positif, la vigilance reste de mise car le virus est toujours là. Nous ne sommes pas à l’abri : l’exemple de nos voisins Calédoniens et Wallisiens nous montre avec quelle rapidité un territoire peut se retrouver confronté à une montée brutale du nombre de personnes contaminées et de malades en détresse sévère ! 

C’est pourquoi nous avons décidé de poursuivre l’application de plusieurs mesures restrictives sur toute la Polynésie :

- En premier lieu, le port du masque demeure obligatoire dans les centre-villes, transports et établissements recevant du public. De même, les évènements festifs restent interdits ;

-En deuxième lieu, l’ouverture des restaurants sera toujours strictement soumise au « protocole restauration » et les édifices du culte toujours concernés par une limitation inchangée de leurs capacités d’accueil ;

-En troisième et dernier lieu, les chapiteaux, salles des fêtes et polyvalentes, tentes et chapiteaux, discothèques, bingos, combats coq, vides-greniers et compétitions sportives avec public demeurent interdits et/ou fermés.
 S’y ajoutent les pirogues à bringue dans certaines ont été récemment sanctionnées grâce à la vigilance des patrouilles en mer des forces de l’ordre.
 

Je tiens ensuite à vous rappeler les trois grandes activités qui ont bénéficié de récents allègements des contraintes à la suite de notre précédente allocution commune il y a un mois.

Les semaines qui viennent de s’écouler n’ont pas révélé de cluster liés à ces activités et nous allons donc maintenir les assouplissements accordés et qui concernent :

-D’abord, les équipements sportifs couverts, comme les salles de sport, encadrés par un protocole sanitaire strict ;

-Ensuite, les compétitions sportives à huis-clos, c’est-à-dire sans public, y compris pour les compétitions se déroulant à l'extérieur, qui, même si elles sont autorisées, ne peuvent être l'occasion de réunir des spectateurs ;

-Enfin, les salles de spectacles et de conférence pouvant accueillir du public mais dans le respect d’une jauge maximale (sur laquelle je reviendrai dans un instant).

Par ailleurs, nous avons estimé avec le président Edouard FRITCH que l’amélioration de la situation à court terme justifiait de nouveaux aménagements qui seront en vigueur du mardi 16 mars au mercredi 7 avril inclus.

 

Comme vous l’imaginez, ces aménagements ne sont pas synonymes de laisser-aller et répondent à des conditions :

- premièrement une exigence de responsabilité des organisateurs qui ont la charge de faire respecter les protocoles sanitaires ;

- deuxièmement une exigence de civisme de la part des citoyens ;

- troisièmement un principe de réversibilité immédiate en cas d’évolution défavorable.

Les aménagements portent sur 6 mesures qui vont diminuer les contraintes quotidiennes.

La première concerne les rassemblements en général qui ne seront plus limités à 6 mais à 15 personnes dans les espaces publics.

La deuxième concerne les foires, expositions et salons qui pourront à nouveau se tenir, sous réserve de respecter une limitation du nombre d’exposants et d’une jauge maximale de public autorisé qui seront précisées par arrêté dans les jours qui viennent.

La troisième concerne certaines salles de jeu (bowling, escape game et jeux vidéos) qui pourront rouvrir, mais dans le respect de protocoles sanitaires adaptés. Les salles dédiées aux jeux d’argent resteront naturellement fermées.

La quatrième permet aux bars qui n’avaient pas d’activités de restauration de rouvrir, dans le respect des mesures applicables aux espaces de restauration.

La cinquième est relative aux salles de spectacles et de conférence déjà mentionnées : la jauge maximale sera augmentée (de 400 à 500) mais dans la limite, toujours, de 50 % de la capacité d’accueil maximale des salles.

La sixième mesure concerne enfin l’évolution du couvre-feu qui sera maintenu à Tahiti et Moorea mais fixé tous les jours de 22h à 4h du matin.

J’ai demandé un strict contrôle aux forces de l’ordre qui verbaliseront les contrevenants, comme cela a été le cas jusqu’à présent.

Et d’ailleurs, depuis le 24 octobre 2020, date de mise en place du couvre-feu, il y a eu près de de 20.000 contrôles pour un peu plus de 1200 verbalisations.

Globalement, les mesures ont été bien respectées grâce à la responsabilité de chacun.

 

La Polynésie française est lancée dans une campagne de vaccination de grande ampleur dont seul le résultat permettra à terme de reprendre une vie normale.

Je souhaite vous réaffirmer qu’avec 26 910 doses de vaccin livrées à ce jour au Pays, l’Etat a totalement répondu aux besoins de la première phase projetée par le ministère de la santé.

A ce jour, près de 15 000 doses ont été utilisées et près de 12 000 doses sont disponibles.

Comme je l’ai dit par le passé, l’objectif de l’État est simple et n’a pas varié : assurer à la Polynésie la livraison d’un nombre de vaccins suffisant pour soutenir la campagne de vaccination et éviter toute pénurie, malgré les difficultés que connaît l’industrie mondiale en la matière.

 

La confiance exige de la transparence, et j’en profite donc pour vous donner le calendrier indicatif de livraison de vaccins, sauf perturbation majeure de la chaîne logistique :

 -De l’ordre de 2300 doses Pfizer chaque semaine du mois de mars ;

-Plus de 4500 doses à partir de la dernière semaine de mars et tout le mois d’avril ;

-Plus de 9000 doses par semaine tout au long des mois de mai, juin et juillet 2021.

En outre, nous recevrons des vaccins Moderna à partir du mois d’avril et le vaccin Astra-Zeneca pourra être utilisé.

Autrement dit les objectifs que nous nous étions fixés à savoir 80 000 personnes vaccinées fin août seront atteints, voire dépassés.

Et en matière de livraison des vaccins, la Polynésie française a été traitée de façon équitable, comme l’ensemble du territoire national.

 

Si ces mesures sont prises c’est à la fois pour assurer la sécurité intérieure mais aussi pour créer les conditions de redémarrage du territoire.

Prenant acte de la dégradation de la situation nationale, européenne et mondiale, le 4 mars, le Premier ministre a prévenu que « les situations locales plus favorables sont fragiles », ce qui ne permet pas d’envisager raisonnablement dans l’immédiat un élargissement des conditions d’accès au territoire polynésien depuis l’Europe ou le reste du monde.

Nous faisons donc le constat qu’à ce stade, une « réouverture » des territoires des outre-mer n’est pas à l’ordre du jour à très court terme.

Toutefois, nous devons nous fixer des perspectives. En effet, le Covid ne doit pas faire oublier ce sur quoi repose largement la vie économique de la Polynésie : le tourisme.

C’est pourquoi nous avons amorcé avec le Pays une réflexion pour préparer la perspective d’une réouverture « responsable » de nos frontières à l’horizon du mois mai pour se donner des perspectives, au moyen d’un « bouclier-sanitaire-réouverture » reposant largement sur la vaccination. Cela concernera dans cette approche aussi bien la protection de notre population que les garanties qui seront exigées de nos visiteurs.

 

Voilà le cap, et nous avons l’ambition partagée de parvenir dans les meilleurs délais à concevoir un dispositif innovant et adapté aux enjeux du retour à une vie normale dans un monde où le virus continuera à circuler encore probablement longtemps.

Une fois de plus nous entendons préserver la sécurité sanitaire des polynésiens, c’est notre objectif premier, tout en préservant notre tissu économique garant des équilibres sociaux.

Nous allons bâtir le dispositif de réouverture des frontières, comme nous avons su le faire l’année dernière, fin juin début juillet, et ce de manière innovante. Nous sommes aujourd’hui en situation de créer un dispositif adapté et protecteur.

L’espoir est permis car si notre mobilisation générale continue de payer continue et que l’amélioration de la situation se confirme d’ici la fin des vacances au moins d’avril, nous pourrons donc envisager de nouveaux assouplissements en interne, et donc quant à la réouverture de notre territoire, soyons innovant. Tout dépendra de l’évolution du contexte sanitaire mondial.

Pays et Etat continueront à agir ensemble dans cette bataille sanitaire, sociale et économique. A cet égard nos dispositifs d’aide respectifs ont été renforcés.

L’Etat a mis en place des mesures de soutien de l’économique : l’Etat payé un peu plus de 9 milliards de francs au titre du fonds de solidarité et 53 milliards de francs de prêt garantie par l’Etat, ce qui permet de maintenir l’activité.

Dans l’immédiat, il faut rester exigent vis à vis de nous même, prudent mais confiant dans l’avenir. Cela ne va pas aussi vite qu’on le souhaitait, mais nous avons réussi à nous protéger, à maintenir l’activité et c’est pourquoi nous donnons des perspectives aujourd’hui.   

Je vous remercie de votre attention.

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