Vœux aux Polynésiens par Eric Spitz Haut-commissaire de la République en Polynésie française à l’occasion de la nouvelle année 2024

Mis à jour le 29/12/2023

Chères Polynésiennes, chers Polynésiens,

Mes chers concitoyens, Ia ora na

Comme chaque année en Polynésie, notre pays où la Terre s’unit à l’Océan, notre Fenua riche de tous ses arts et de la grandeur de son histoire millénaire, 2023 a été rythmée par les événements culturels.

En célébrant, en début d’année la réouverture du musée de Tahiti et des îles, j’espérais très sincèrement que nous entrions dans une année de renouveau et d’espérance, pour la Polynésie et pour la France, bien sûr, mais aussi pour notre planète Terre toute entière.

Nous avons salué à cette occasion le retour du Maro’Ura et de la statue du Dieu A’a ; celui du Heva Tupapa’u, (le costume du deuilleur) et de tant d’autres œuvres considérables du patrimoine polynésien.

Après le Heiva, qui a rassemblé de juin à juillet, toute la Polynésie autour de ses patrimoines et de ses cultures, 2023 s’achève avec le festival des Marquises, formidable rendez-vous de tous les Marquisiens, heureux de se retrouver et d’accueillir en partageant le meilleur de ce qu’ils portent au plus profond d’eux-mêmes.

Cette année encore, les va’a sont partis aux vents des îles parcourir notre océan pour aller à la rencontre de l’autre, comme on va à la rencontre de soi-même.

Mais l’année qui s’achève aura été marquée dans le village monde qui est désormais le nôtre par la poursuite de conflits hérités du passé, par de nouvelles tensions et par les nuages noirs de la division en Europe comme en France.

Nous faisons face à de nouveaux défis et à de nouveaux enjeux, et nous savons bien que nous ne pouvons pas échapper aux répercussions d’événements qui s’inscrivent désormais dans une dynamique mondiale, qui n’épargnent plus aucun pays, qui ne préservent plus aucun peuple ni aucune personne.

Nous savons bien nous-mêmes, ici en Polynésie que le changement climatique est la cause première de catastrophes naturelles de plus en plus nombreuses, et nous nous nous employons, à l'échelle de notre grand espace océanien, à mettre en œuvre tous les moyens pour éviter ou tout au moins pour réduire les effets de la catastrophe annoncée.

Ce sont 7,16 milliards de francs pacifique qui sont mobilisés grâce au Fonds de transition énergétique pour accélérer le développement des énergies renouvelables. Et ce sont 7 milliards de francs pacifique qui seront investis dans le cadre du Fonds vert pour accélérer la transition écologique, face au dérèglement climatique

Notre espérance, celle de tous les hommes de cette terre, ne peut avoir de chance aujourd’hui de nous porter, pour affronter les enjeux du temps présent, que si nous sommes en mesure de comprendre que nous faisons la route ensemble.

De toute la France d’outre-mer, nous pourrions dire que la Polynésie est le Pays qui se porte le mieux. Nos indicateurs économiques sont favorables et surtout notre force c’est le vivre ensemble.

En avril vous avez élu une nouvelle majorité territoriale et un nouveau gouvernement s’est mis en place.

Dès le lendemain de ces élections, les services de l’État ont rencontré les nouvelles autorités polynésiennes et ensemble nous nous sommes mis au travail, témoignant de l’indispensable continuité de l’État et du Pays.

Mais pouvons-nous nous en satisfaire si nous laissons sur le bord de la route temps de vies cabossées, tant d’enfants meurtris, tant de laissés pour compte ?

Pour beaucoup d’entre vous, l’année 2023 a été une année de difficultés, parfois de précarité et même d’absence de perspective.

A chacun, je veux réaffirmer ce soir l’attention, l’affection et le soutien de l’État. Parce que cette route semée d’embûches nous la faisons ensemble.

De la même manière, à ceux qui ont perdu un proche, comme à ceux que ces mots atteindront sur un lit d’hôpital, je veux témoigner de la solidarité de la Nation tout entière. Parce que, dans la détresse et dans le doute, nous demeurons ensemble.

Ensemble ! Nous faisons la route ensemble.

Cela veut dire que nous devons être encore plus solidaires, encore plus attentifs à celui qui souffre à celui qui ne peut plus suivre, à celui qui ne veut plus poursuivre.

Ensemble ! Ce n’est pas au polynésien que j’apprendrai ce que ce mot veut dire.

Terre de l’accueil et du partage, terre de la compréhension de l’autre et de la conscience de soi, la Polynésie est en mesure d’apporter une certaine idée des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, en contribuant ainsi à consolider le socle républicain.

Ensemble ! Nous souhaitons vibrer tous ensemble à cette formidable célébration des sports que seront les Jeux olympiques 2024 qui se tiendront à Paris, mais aussi en Polynésie.

Ensemble ! N’est-ce pas d’une cette certaine manière l’un des enseignements de l’olympisme ? Des valeurs transmises par Coubertin et les pères fondateurs ? Retrouvons la joie et le plaisir d’être ensemble.

Ensemble pour recevoir de l’autre, et offrir de nous-mêmes, le meilleur, seulement le meilleur.

Ensemble pour unir nos forces et donner une nouvelle chance à notre village monde.

Ensemble pour aujourd’hui et pour nous-mêmes bien sûr, en affirmant tout simplement notre droit de croire et d’espérer.

Ensemble pour demain et pour nos enfants. Même si nous savons bien qu’il leur restera tant à faire.

Parce que nous avons le devoir de faire de notre mieux.

Alors, face au déferlement de haine qui plonge certaines régions du monde dans le chaos et la destruction, il nous faudra, à l’instar du marin, toujours regarder l’horizon.

Cet horizon, c’est un horizon d’espoir.

Espoir d’une société polynésienne qui surmonte ses divisions et conserve la cohésion qui fait sa force.

Espoir d’un monde où notre nature ne constitue plus la variable d’ajustement d’un système économique à bout de souffle.

Pour atteindre cet horizon, nous devons désormais réapprendre à entendre et à comprendre la nature et à compter sur elle.

Nous ne parviendrons pas à relever les défis qui nous attendent dans notre village monde, si nous demeurons incapables de nous entendre et d’être ensemble ;

Mais il nous faut accepter aussi d’entendre et de comprendre notre planète Terre, en lui reconnaissant cette conscience suprême et cette autorité morale qui sont pleinement les siennes.

Ensemble ! Parce que riches de nos différences et de nos singularités nous formons un ensemble pluriel, à l’échelle de la Polynésie comme à celle de la France.

Au seuil d’une nouvelle année, j’exprime pour chacun de vous, pour la Polynésie et pour la France, mes vœux chaleureux de bonheur et de réussite dans la liberté d’être et de croire, l’égalité des chances et la fraternité du partage.

 IA ORA I TE MATAHITI API